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mercredi 18 juillet 2012

L'été des comiques: Raymond Devos





Cet été 2012 ne restera pas dans les annales, difficile de prendre son pied quand les mauvaises nouvelles fusent de tous côtés. Le diablogueur souhaite ardemment pallier à la morosité ambiante et pour cela, rien de tel qu'une bonne dose d'humour. La section estivale 2012 sera donc consacrée aux humoristes et cela tombe bien car la France regorge de comiques en tous genres. On peut même dire sans trop se méprendre que la France est le pays qui compte le plus grand nombre de comiques puisque, par exemple, Wikipédia en répertorie 335 alors que d'autres grands pays de rigolos en comptent moins (l'Espagne 103, l'Italie 33, la Grande-Bretagne 67 ou les États-Unis 310). Nous essaierons d'expliquer ce phénomène propre à la France dans une rubrique ultérieure car pour inaugurer cette nouvelle section, le diablogueur a jeté son dévolu (patrie oblige) sur un comique ... belge. Et pas n'importe lequel puisqu'il s'agit sans doute d'un des maîtres du genre comique à savoir Raymond Devos. Ce diable d'homme né à Mouscron en 1922 a régné pendant un peu plus de 50 ans sur le paysage comique francophone jusqu'à sa mort en 2006. Grâce à son style unique et particulier pétri de jeux de mots et d'absurde, il a réussi l'exploit de plaire en même temps au grand public et aux milieux littéraires avec à la clé une bonne douzaine de prix et distinctions diverses et surtout la création en 2003 du prix qui porte son nom et qui distingue chaque année un artiste ayant contribué au progrès de la langue française, à son rayonnement et à sa promotion. Voici donc trois sketchs du grand Devos, à consommer sans modération. 



Caen


J'avais dit : - "Pendant les vacances, je ne fais rien !... Rien ! Je ne vais rien faire ".
Je ne savais pas où aller. Comme j'avais entendu dire : - "A quand les vacances ?... A quand les vacances ?..."
Je me dis : - " Bon !... Je vais aller à Caen...".
Et puis Caen !... ça tombait bien, je n'avais rien à y faire. Je boucle la valise... je vais pour prendre le car...
Je demande à l'employé :
- Pour Caen, quelle heure ?
- Pour où ?
- Pour Caen !
- Comment voulez-vous que je vous dise quand, si je ne sais pas où?
- Comment ? Vous ne savez pas où est Caen ?
- Si vous ne me le dites pas !
- Mais je vous ai dit Caen !
- Oui !... mais vous ne m'avez pas dit où !
- Monsieur... je vous demande une petite minute d'attention !
Je voudrais que vous me donniez l'heure des départs des cars qui partent pour Caen !
- !!! ...
- Enfin !... Caen !... dans le Calvados !...
- C'est vague !
- ...En Normandie !... Ma parole ! Vous débarquez !
- Ah !... là où a eu lieu le débarquement !... En Normandie !
- A Caen... Là !
- Prenez le car.
- Il part quand?
- Il part au quart.
- !!! ... Mais (regardant sa montre)... le quart est passé !
- Ah ! Si le car est passé, vous l'avez raté.
- !!! ... Alors... et le prochain?
- Il part à Sète.
- Mais il va à Caen?
- Non il va à Sète.
- Mais, moi, je ne veux pas aller à Sète... Je veux aller à Caen !
- D'abord, qu'est-ce que vous allez faire à Caen ?
- Rien !... rien !... Je n'ai rien à y faire !
- Alors, si vous n'avez rien à faire à Caen, allez à Sète.
- !!! ... Qu'est-ce que vous voulez que j'aille faire à Sète ?
- Prendre le car !
- Pour où ?
- Pour Caen.
- Comment voulez-vous que je vous dise quand, si je ne sais pas où !...
- Comment !... Vous ne savez pas où est Caen ?
- Mais si, je sais où est Caen !... Ça fait une demi-heure que je vous dis que c'est dans le Calvados !...
Que c'est là où je veux passer mes vacances, parce que je n'ai rien à y faire !
- Ne criez pas !... Ne criez pas !... On va s'occuper de vous.

Il a téléphoné au dépôt.

Mon vieux !... (regardant sa montre) :
A vingt-deux, le car était là.
Les flics m'ont embarqué à sept...
Et je suis arrivé au quart.
Où j'ai passé la nuit !




Où courent-ils?

Excusez-moi, je suis un peu essoufflé !
Je viens de traverser une ville où tout le monde courait.
Je ne peux pas vous dire laquelle…
Je l’ai traversée en courant !
Lorsque j’y suis entré, je marchais normalement,
Mais quand j’ai vu que tout le monde courait…
je me suis mis à courir comme tout le monde sans raison !

À un moment, je courais au coude à coude avec un monsieur.
Je lui dis :
— Dites-moi… Pourquoi tous ces gens-là courent-ils comme des fous ?
— Parce qu’ils le sont ! Vous êtes dans une ville de fous ici… Vous n’êtes pas au courant ?
— Si, Si, des bruits ont couru !
— Ils courent toujours !
— Qu’est-ce qui fait courir tous ces fous ?
— Tout ! Tout ! Il y en a qui courent au plus pressé. D’autres qui courent après les honneurs… Celui-ci court pour la gloire… Celui-là court à sa perte !
— Mais pourquoi courent-ils si vite ?
— Pour gagner du temps ! Comme le temps, c’est de l’argent, plus ils courent vite, plus ils en gagnent !
— Mais où courent-ils ?
— À la banque ! Le temps de déposer l’argent qu’ils ont gagné sur un compte courant… et ils repartent toujours courant, en gagner d’autre !
— Et le reste du temps ?
— Ils courent faire leurs courses… au marché !
— Pourquoi font-ils leurs courses en courant.
— Je vous l’ai dit… parce qu’ils sont fous !
— Ils pourraient tout aussi bien faire leur marché en marchant… tout en restant fous !
— On voit bien que vous ne les connaissez pas ! D’abord le fou n’aime pas la marche…
— Pourquoi ?
— Parce qu’il la rate !
— Pourtant, j’en vois un qui marche !
— Oui, c’est un contestataire ! Il en avait assez de courir comme un fou. Alors il a organisé une marche de protestation !
— Il n’a pas l’air d’être suivi ?
— Si, mais comme tous ceux qui le suivent courent, il est dépassé !
— Et vous, peut-on savoir ce que vous faites dans cette ville ?
— Oui ! Moi j’expédie les affaires courantes. Parce que même ici, les affaires ne marchent pas !
— Et où courez-vous là ?
— Je cours à la banque !
— Ah !… Pour y déposer votre argent ?
— Non ! Pour le retirer ! Moi je ne suis pas fou !
— Mais si vous n’êtes pas fou, pourquoi restez-vous dans une ville où tout le monde l’est ?
— Parce que j’y gagne un argent fou !… C’est moi le banquier !…








Le petit poussin

Récemment, je suis entré dans une auberge pour y dîner et sur la carte, il y avait marqué: " Poussin rôti ".
Et... j'ai commandé un poussin rôti.
J'ai vu arriver un petit poussin... dans une assiette...
- "Hamm !!!". Je n'en ai fait qu'une bouchée dans mon gros ventre !
Un petit poussin ! Vous avez déjà vu un petit poussin ? C'est mignon à croquer !
C'est une petite boule jaune... Ça fait : "Cui-cui..."
Il n'était pas cuit ! Et je n'en ai fait qu'une bouchée dans mon gros ventre !

Ça aurait été une vieille poule, encore... Bon ! Une dure à cuire... elle a vécu ! (Elle a fait son temps !)
Mais un petit poussin... ! J'aurais mieux fait d'aller me faire cuire un oeuf !
Oh, ça ne vaut guère mieux ! Chaque fois qu'on va se faire cuire un oeuf, c'est comme si on envoyait un poussin se faire cuire !
- "Parce que, qu'est-ce qui fait le poussin ? "
- "C'est l'oeuf !"
Et encore... on ne sait plus ! Il y a ce fameux dilemme que chacun connaît :
- "Qu'est-ce qui fait l'oeuf ? "
- "C'est la poule !"
Bon ! Jusque-là, il n'y a rien à dire. On est tous d'accord.
- "Mais qu'est-ce qui fait la poule ? "
- "... C'est l'oeuf !"
Alors, la question est : Qui a commencé ?
Est-ce l'oeuf le père de la poule, ou la poule la mère de l'oeuf ?
Ça ne peut pas être le coq ! Les coqs, eux, ne pondent pas d'oeufs !
Quoiqu'il n'y ait pas de poules sans eux ! (oeufs) Sans eux... les coqs !
Comme il n'y a pas de coqs sans elles... (ailes) Sans elles, les poules !
Évidemment ! Parce que sans ailes, il n'y aurait ni coqs, ni poules, ni poussins !
Et ce serait tant mieux ! Parce que j'aurais mangé autre chose !

J'aurais mangé du veau... Un petit veau ! Vous avez déjà vu un petit veau ?
Un vieux boeuf... bon ! Passe encore. Il a vécu... !
Mais un petit veau... Vous avez déjà vu une petite tête de veau... ? A la vinaigrette !!!

J'aurais mieux fait de manger un oeuf, parce que, comme on dit : "Qui mange un oeuf mange un boeuf !!!"


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